Leo Fabrizio

Durant plus de cinq ans, j’ai développé un travail photographique documentaire sur les constructions fortifiées suisses, les bunkers. Spécialement attiré par la photographie de paysage et ayant un grand attrait pour la montagne, ma recherche a logiquement débouché sur ces ouvrages qui jalonnent, d’une manière systématique, chaque passage stratégique, c’est-à-dire col alpin, entrée de vallée, défilé etc.
Dans un premier temps, j’ai repéré un certain nombre d’ouvrages proches des routes ou facilement visibles à cause de leur camouflage assez sommaire. Très vite, la relation entre ces bunkers aux formes rudimentaires et le paysage souvent somptueux qui les entoure est devenue une question essentielle dans mon travail. Etant donné la désuétude actuelle de ces objets, la tendance est plutôt à les oublier, voire à les renier. Ma démarche esthétique vise au contraire à les montrer sous un angle nouveau. Cette démarche m’a poussée à en découvrir un grand nombre, afin de sélectionner les plus intéressants, et cela dans les endroits reculés, parfois difficilement accessibles, et sur l’ensemble du territoire.
Dans un second temps, j’ai recherché les bunkers les plus spectaculaires, notamment par leurs dispositifs de camouflage, véritables décors de théâtre et réalisés avec le plus grand soin. Une qualité, typiquement suisse.
La Suisse est prépondérante dans ma réflexion. Non seulement c’est là d’où je viens, ensuite chaque élément de ces photographies entretient un rapport avec la Suisse. Le paysage, et surtout le paysage de montagne, est un symbole extrêmement fort dans ce pays et fait totalement partie de notre identité. Les bunkers, quant à eux, représentent tout un système militaire fortement développé en Suisse. Les liens que l’on peut faire entre ces deux symboles sont multiples et soulèvent des questions intéressantes.
Chaque ouvrage possède des caractéristiques singulières. Je n’ai donc pas essayé d’appliquer un protocole photographique fixe: la distance, l’angle de vue, le travail sur la lumière etc. varient selon les qualités particulières de ces ouvrages d’art.